On ne se fait pas justice soi-même, telle est la règle. Pourtant, lorsqu’un homme tranquille, honnête, se voit traité comme un meurtrier alors qu’il a donné la mort pour défendre sa vie ou ses biens, l’opinion publique a du mal à comprendre. Et de s’interroger : que se serait-il passé si Anne-Lorraine Schmitt, la jeune femme assassinée dans le RER D, avait tué son agresseur ? Lui aurait-on reproché de porter une arme de défense ?
Pourtant, le procès de son meurtrier a mis en évidence le danger pour une femme de prendre simplement les transports en commun. L’autre soir, un dossier du journal de France 2 était consacré au sujet, micro-trottoir à l’appui. L’appréhension n’était pas feinte chez les personnes interrogées. L’une d’elles, une dame entre deux âges, a eu cette réponse, que je cite de mémoire : « Si j’ai peur, je ne suis pas obligée de le montrer ».
Se contrôler, c’est déjà faire preuve de courage. Mais pas facile de résister à cette angoisse latente, alors que chaque jour la presse se fait l’écho de violences et que nos politiciens en ont fait leur fonds de commerce. Le dernier truc à la mode, c’est de nous montrer des agressions enregistrées par les caméras de vidéosurveillance. Une sorte de reality-show. Conclusion : on serre les fesses en grimpant dans un wagon vide ou en attendant la rame, lorsque le quai est désert.
On souhaiterait presque apercevoir la casquette d’un flic ! Je rigole (jaune). Car même les policiers n’hésitent pas à se plaindre de la violence et des attaques dont ils font l’objet. Faudra-t-il, comme l’avait proposé naïvement Ségolène Royal lors de la campagne pour les Présidentielles, protéger les policières par des policiers !
Et pourtant, eux, ils sont armés. Tandis que nous…
Alors, la question se pose ainsi : si la vie en société est devenue si dangereuse, comme on nous le serine, pourquoi nous interdire le droit de se défendre ?
Je sais, je sais, sujet explosif dont il ne faut pas parler. Et pourtant…
Dans une récente proposition de loi, les parlementaires n’hésitent pas à affirmer que chacun a le droit de posséder une arme pour ses loisirs, comme le tir ou la chasse, ou pour faire face à « toute agression illégale ».
Hou là, on se dit, ça y est ! Sans devenir aussi tolérants que les Ricains, on vient de franchir un pas.
Car en suivant le fil de ce texte, on pouvait comprendre que l’on s’acheminait vers la possibilité pour tout un chacun de porter sur soi, non pas un revolver ni une Kalachnikov, mais une arme non létale. Un petit truc pour ne pas être complètement vulnérable si des méchants s’en prennent à nous. Une révolution. Car aujourd’hui, le moindre canif est considéré comme une arme par intention. Hormis le mini-spray au poivre (et encore, sous certaines conditions), il est interdit d’avoir sous la main le moindre ustensile d’auto-défense. Même la canne de papy est prohibée, si elle est plombée.
Mais dans le rapport final, du mois de novembre 2010, c’est un autre son de cloche. Le port d’une arme de catégorie C, c’est-à-dire les moins dangereuses, sera puni d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.
Les parlementaires ont la dent dure, lorsqu’il ne s’agit pas de leur patrimoine.
Donc, les honnêtes gens n’ont pas le droit de défendre leur peau. Pour leur sécurité, ils ne peuvent compter que sur les pouvoirs publics. Mais, peu à peu, pour des raisons de gros sous, et malgré des annonces fracassantes, l’État semble se défaire d’une partie de sa responsabilité au profit des communes et même des entreprises privées. On s’achemine donc vers une sécurité à plusieurs vitesses. Selon que vous habitez dans une commune riche ou pauvre, vous serez plus ou moins bien protégé. Sauf évidemment si vous avez les moyens de vous offrir une protection privée.
Pourtant, parallèlement, tout en se vantant d’une politique hors de « nos » moyens, les grands chefs continuent d’agiter le chiffon rouge. Or, on ne peut pas nous faire peur en permanence et dans le même temps diminuer le nombre de policiers et de gendarmes. Ce n’est pas crédible. Et si les gens n’y croient plus, il n’est pas impossible qu’un jour, dans un réflexe d’auto-défense, ils s’arment à leur tour - avec l’accord du législateur ou non.
Car l’instinct de survie est le plus fort. C’est lui qui nous souffle cet adage vieux comme le monde et qu’il ne faut surtout pas prononcer à voix haute de crainte de passer pour un « affreux » : Il vaut mieux faire le boucher que le veau.
Je suis d’accord, l’expression n’est pas jolie jolie. Mais l’image est forte.""""""""""""
Le blog de georges moréas
http://moreas.blog.lemonde.fr/2010/12/25/pas-darmes-dans-la-hotte-du-pere-noel/