Article publié le 22 novembre 2009.
L’Adefdromil croyait en avoir fini avec le Pacs dans les armées. C’était sans compter sur la résilience de la haute hiérarchie du ministère, secrétaire général pour l’administration et directeur des ressources humaines, notamment qui trainent des pieds pour retarder l’application de la loi ou trouver des finasseries pour ne l’appliquer que partiellement.
Le PACS… les idéologues y voient la main de Satan souillant la pureté du mariage. Quant aux pragmatiques, ils ont compris que c’est un moyen juridique souple pour unir deux vies et même fonder une famille.
En matière de traitements et salaires, toutes les administrations ainsi que le secteur privé ont accordé aux pacsés les mêmes droits salariaux et sociaux qu’aux mariés.
Sauf le ministère de la défense, qui refuse toujours dix ans après que le Pacs a été intégré dans le code civil, d’aligner les salaires des soldats français pacsés sur ceux des mariés. Son objectif quasi militaire est de NE PAS PAYER ou à la rigueur de payer avec beaucoup de RETARD et en évitant toute rétroactivité au détriment des intérêts des militaires concernés.
L’Adefdromil, qui cherche à faire appliquer le droit dans les armées s’est attaquée au problème. En décembre 2008, elle a ainsi été déboutée, par le Conseil d’état de sa demande d’annulation des décrets relatifs aux fonds de prévoyance militaire et de l’aéronautique et aux conditions et modalités de règlement des frais occasionnés par les changements de résidence des militaires sur le territoire métropolitain de la France au motif qu’elle n’aurait pas eu d’intérêt à agir. Elle a ensuite demandée aux autorités administratives compétentes, le président de la République et le premier ministre et conformément à la loi, de supprimer dans ces décrets la condition de durée du PACS de 3 ans déclarée illégale par le rapporteur public du Conseil d’Etat. Des projets ont donc été soumis en urgence au Conseil supérieur de la fonction militaire qui s’est réuni en juin dernier. Mais aucun texte modificatif n’est encore paru au journal officiel.
Tout en donnant raison depuis plusieurs années à tous les militaires pacsés introduisant un recours, sur le fondement de la rupture du principe d’égalité, le Conseil d’Etat et les tribunaux administratifs continuent à enjoindre au ministre de la défense de réexaminer la situation des requérants,
mais sans astreinte et sans fixer de point de départ aux droits indemnitaires, alors que le code général des impôts dans son article 6 a supprimé à compter du 1
er janvier 2005 la condition de trois ans de PACS pour l’imposition commune. Le juge administratif laisse ainsi la place à de nouveaux contentieux qui permettent d’épuiser les justiciables.
Aucun changement d’attitude des juridictions administratives n’est constaté à ce jour, depuis la décision n° 319678 du Conseil d’État (7ème sous-section) du 5 août 2009. En effet, sur ce recours pour excès de pouvoir, extrêmement précis et clair quant aux dates d’ouverture des droits, à l’injonction, à l’astreinte et aux intérêts de droit, la Haute juridiction a confirmé qu’elle préfère botter en touche.
Le ministère de la défense, fort de cette mansuétude, souhaite ainsi distinguer « (…) les indemnités spécifiques aux militaires qui feraient l’objet d’une extension aux militaires liés par un PACS dans des conditions adaptées à leur situation juridique. Dans cette perspective, la production d’une preuve de l’imposition commune sur le revenu au titre d’une année civile complète serait demandée. (…) », en réponse à la question parlementaire n° 55867 de Mme Patricia Adam, députée du Finistère (question publiée au journal officiel du 28 juillet 2009, page 7320 ; réponse du ministre de la défense Hervé Morin publiée au JO du 15 septembre 2009, page 8771).
Bien évidemment, le conseil supérieur de la fonction militaire, lors de sa 79
ème session du 15 au 19 juin 2009 et l’Assemblée nationale, plus récemment, sont tombés dans les deux pièges de cet argumentaire :
1er piège : le personnel militaire est le seul dans l’ensemble de la fonction publique à bénéficier d’indemnités liées à la famille afin de compenser ses charges spécifiques, notamment la fréquence des mutations, la difficulté pour le conjoint à trouver un emploi, etc. (voir liste des indemnités en annexe).
On ne comprend pas bien pourquoi les conditions d’attribution de ces indemnités devraient être « adaptées ». Pour prendre un exemple frappant, quelle est la différence entre un conjoint marié qui attend le retour de conjoint militaire en mission opérationnelle en Afghanistan, et un conjoint pacsé dans la même situation ? Quelle adaptation est nécessaire ?
2ème piège : Toujours, dans cette perspective, la production d’une preuve de l’imposition commune sur le revenu au titre d’une année civile complète serait demandée.
Et donc, en attendant l’avis d’imposition, l’administration militaire décalerait-elle les paiements d’une année ?
Avec calculs et sommes à verser rétroactivement ?
Y compris les revenus imposables, cotisations sociales, etc. ?
Il serait en effet trop simple de payer tout de suite et de contrôler un an après, quitte à effectuer une régularisation négative sur salaire.
En définitive, le choix de la guerre de tranchée imposé au ministre par son administration est significatif de l’état d’esprit de la haute hiérarchie du ministère, arcboutée sur ses privilèges et manifestant un profond mépris de l’état de droit. Les millions d’euros de primes de rendement diverses qui sont distribués annuellement, sont-elles financées par les économies réalisées en toute illégalité sur le dos des Pacsés ?. On peut raisonnablement se le demander.
Serait-il excessif de demander au ministre Morin de respecter la loi et les droits des personnels placés sous son autorité, ainsi que de se faire obéir de ses grands subordonnés ?
http://adefdromil.org/?p=3470