Police nationale de Pau :"on voudrait faire de nous des robots à verbaliser".

Les brigades de la police nationale travaillent depuis l'an dernier avec des objectifs chiffrés en matière de sécurité routière et d'interpellation sur Pau et l'agglomération.

Le management a visiblement changé au commissariat de Pau. Pour la première fois, toutes les brigades qui travaillent pour la lutte contre l'insécurité routière et réalisent des interpellations sur Pau et l'agglomération ont reçu, en début d'année, un tableau avec des chiffres bien précis à atteindre. C'est le directeur départemental de la sécurité publique, Thierry Alende, qui a pris la décision de cette nouvelle formule de travail. Ces objectifs ne sont donc pas fixés pas la municipalité de Pau (lire le zoom).

Les brigades motorisées, les brigades anti-criminalité (BAC), le poste de police Ronsard, la brigade de la police judiciaire, de l'ordre publique et les différentes unités de roulement comme police secours ont reçu ces documents en tout début d'année.

Selon ce tableau, une partie des 180 fonctionnaires palois (un chiffre qui englobe aussi le service administration et investigation) devrait arriver à verbaliser 450 personnes pour conduite en état d'ivresse. Les policiers devraient également dresser 1 450 PV pour défaut aux règles de conduite, 180 pour défaut de port de ceinture ou de casque, 300 pour des problèmes d'équipement sur un véhicule, 215 pour défaut d'assurance, 51 pour des refus d'obtempérer...

« On voudrait faire de nous des robots à verbaliser, des percepteurs d'impôts. C'est vraiment la culture du chiffre », dénonce Joseph Cilluffo, secrétaire départemental de l'Unité Syndicat général de police-FO, syndicat majoritaire sur le département. « Cette culture du résultat ne permet pas de régler les problèmes. On sait bien que la 'peur du gendarme', à elle seule, produit déjà un effet sur la sécurité routière. Quant aux agents de la BAC, ils ont tout intérêt à ne pas être reconnus et pourtant, ils ont des objectifs fixés qui peuvent les pénaliser. »

Des primes au mérite

Le syndicat pointe aussi une méthode qui pourrait « freiner la carrière des agents ». « Si les policiers remplissent ces objectifs, ils seront bien vus par leur hiérarchie. Dans le cas contraire, ils pourraient ne pas bénéficier de stages intéressants, de formations... ».

Selon le syndicat, il existait déjà une prime au mérite de 500 €/an laissée à l'appréciation des chefs de service, qui est perçue par environ 10 % des agents. « C'est aussi une démarche que l'on dénonce car cela veut dire que 90 % des autres fonctionnaires ne sont pas méritants. »

Pour le secrétaire départemental du syndicat, ces objectifs représentent aussi un nouveau coup porté au portefeuille des automobilistes.

>> « Il s'agit seulement d'une méthode de travail »

Interview de Thierry Alende, directeur départemental de la sécurité publique

Pourquoi proposez-vous ce nouveau type de management ?

J'ai fixé aussi bien des objectifs à atteindre en matière d'interpellations que pour l'insécurité routière. Pour rappel, sur Pau et l'agglomération nous avons comptabilisé 800 accidents corporels en 2010. Il ne s'agit pas d'une instruction du préfet, mais bien d'une décision de ma part. C'est une méthode de travail qui a commencé à être mise en place en 2010 et dont les objectifs chiffrés ont été donnés en début d'année.

Comment avez-vous fixé ces objectifs ?

Nous nous sommes basés sur les chiffres de l'année précédente pour ne pas fixer des objectifs trop ambitieux. Il s'agit de tirer vers le haut le travail des brigades, de rendre un meilleur service public. À terme, cela doit permettre à chaque brigade de pouvoir faire le point sur ses besoins, d'expliquer d'éventuelles lacunes. L'important c'est que nous puissions nous poser les bonnes questions, de provoquer une réflexion.

Et si ces objectifs ne sont pas atteints ?

Le but de cette méthode est tout d'abord de pouvoir nous améliorer. C'est donc un scandale de dire que les agents qui n'ont pas atteint leurs objectifs seront pointés du doigt. Il s'agit de toute façon d'une évaluation par brigade. Seul un mauvais comportement peut être sanctionné. Et quand les résultats sont bons, nous le ferons savoir par oral et dans les évaluations écrites.

Je ferai également remarquer que les objectifs fixés pour le mois de janvier ont été atteints au-delà de nos attentes.

>> La police municipale et les agents de surveillance travaillent différemment

La police municipale et les agents de surveillance de la voie publique (ASVP) qui verbalisent les infractions au stationnement payant et le stationnement gênant ne sont, eux, soumis à aucun objectif de la part de la Ville. En 2007, ces agents municipaux avaient dressé 60 155 PV. Un chiffre qui est passé à 47 204 en 2010, soit une baisse de 21,52 % en trois ans.

http://www.larepubliquedespyrenees.fr/2011/02/17/la-police-nationale-de-pau-soumise-a-des-objectifs,181088.php

PAU — Le syndicat Unité-SGP-Police, majoritaire dans la police nationale, a dénoncé jeudi à Pau des "quotas d'infractions imposés" aux policiers de cette agglomération, dans une note comportant une prévision chiffrée d'infractions routières à relever en 2011.

Le tableau des "objectifs 2011", objet d'une note interne de la direction départementale de la sécurité publique des Pyrénées-Atlantiques, précise le nombre de verbalisations attendues au cours de l'année, pour chaque brigade de police de la région paloise et pour chacune des onze infractions routières inventoriées, a révélé jeudi le quotidien Sud Ouest.

Ces "objectifs" concernent aussi bien les excès de vitesse, le défaut d'assurance ou d'équipements obligatoires que les infractions pour conduite en état d'ivresse ou sous l'effet de stupéfiants, le franchissement de feux rouges et le "refus d'obtempérer". Le document précise pour cette dernière catégorie de relever cinq infractions par mois pour chaque brigade routière.

"C'est l'exemple même d'un quota absurde", a déclaré à l'AFP Fréderic Chauvin, porte-parole d'Unite-SGP-Police des Pyrénées-Atlantiques au sujet de la catégorie "refus d'obtempérer" - en pratique les conducteurs qui prennent la fuite plutôt que de se soumettre aux directives d'un agent de police.

Selon Frédéric Chauvin, ces "objectifs" sont bel et bien des "quotas d'infractions imposés" dont les responsables des brigades et leurs agents "savent bien qu'ils déterminent des montants de primes de fin d'année et les avancements professionnels".

"Il ne faut pas nous prendre pour des lapins de six semaines", commente ce responsable syndical. "Si ces tableaux ne sont pas nouveaux, ajoute-t-il, ils ont pour effet de pousser de plus en plus les agents à verbaliser tout ce qui bouge, au détriment des fonctions essentielles de prévention et de contact avec la population".

http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5hbDQQcoQtk666GZvKcFUWH-5XGow?docId=CNG.2907e771282957c47c74b5e5d337e829.401

Comment avez-vous fixé ces objectifs ?
Nous nous sommes basés sur les chiffres de l'année précédente pour ne pas fixer des objectifs trop ambitieux. Plus on en fait et plus il en est demandé, mais le jour où les quotas ne sont pas atteints, attention au retour de baton.
Il s'agit de tirer vers le haut le travail des brigades, de rendre un meilleur service public. J'hallucine ! Comme si verbaliser à outrance permettait d'améliorer le service public !
À terme, cela doit permettre à chaque brigade de pouvoir faire le point sur ses besoins, d'expliquer d'éventuelles lacunes. L'important c'est que nous puissions nous poser les bonnes questions, de provoquer une réflexion. Effectivement il faudra plus de carnet à souche pour paiement différé et de paiement immédiat et il faudra affiner les méthodes de verbalisation. L'actualité montre que bien que les automobilistes sont plus prudents et que le tiroir caisse de l'Etat ne fait plus le même bruit.

Et si ces objectifs ne sont pas atteints ?
Le but de cette méthode est tout d'abord de pouvoir nous améliorer. C'est donc un scandale de dire que les agents qui n'ont pas atteint leurs objectifs seront pointés du doigt. Mais oui, tout le monde sait que le baton et la carotte ne sont faits que pour les anes.
Il s'agit de toute façon d'une évaluation par brigade. C'est exactement l'opposé de ce qui est écrit juste avant ! On ne pointe pas du doigt les mauvais élèves, mais on évalue les unités pour mieux les classer dans l'ordre de leurs résultats et à terme mieux justifier la prime au mérite. A part ça, non personne n'est montré du doigt.
Seul un mauvais comportement peut être sanctionné. Et quand les résultats sont bons, nous le ferons savoir par oral et dans les évaluations écrites.

Je ferai également remarquer que les objectifs fixés pour le mois de janvier ont été atteints au-delà de nos attentes. On n'attire pas les mouches avec du vinaigre. Pour la prime au "mérite" c'est pareil.

>> La police municipale et les agents de surveillance travaillent différemment

La police municipale et les agents de surveillance de la voie publique (ASVP) qui verbalisent les infractions au stationnement payant et le stationnement gênant ne sont, eux, soumis à aucun objectif de la part de la Ville. En 2007, ces agents municipaux avaient dressé 60 155 PV. Un chiffre qui est passé à 47 204 en 2010, soit une baisse de 21,52 % en trois ans. Aucun objectif (quota) imposé et pourtant les chiffres sur les infractions au stationnement ont CHUTE 21,52 %. Lorsque le nombre des accidents routiers baisse, il faut mettre le paquet sur l'alcoolémie, les ceintures, le téléphone au volant. C'est ni plus ni moins qu'une comptabilité d'épicerie de quartier.
[b]

Bonsoir,

Je reprends les éléments que j'ai donné sous le titre "Quota de PV".

Sauf manquements évidents, le principe des quotas est une politique exécrable de gestion. Elle ne peut se justifier que si une analyse complète des phénomènes d'insécurité routière a été effectuée. De cette analyse pourraient être déduits des objectifs bien ciblés adaptés aux lieux, aux zones d'accidents et aux comportements locaux.

Maintenant, le document présenté aux informations de TF1 mérite un petit commentaire :


L'effectif du commissariat était de 233 personnels fin 2010, si on conserve le chiffre de 180 annoncé sur ce post (il faut bien quelques chefs et administratifs), il semble que nous sommes loin d'une répression débordante.
Passons sur l'absurdité de quantifier des refus d'obtempérer (faut-il les provoquer ?) Mais les objectifs faramineux c'est :
- 2 infractions pour stop et feu tricolore par personnel et par an ;
- 8 infractions de conduite par personnel et par an ;
- etc.
Au total 4160 PV pour 180 personnels soit moins de vingt infractions par an pour chacun.

Combien de gendarmes signent immédiatement pour une telle pression ?

Pour être sincère, j'aurais préféré voir les syndicats monter au créneau avec des chiffres sur la délinquance, le nombre d'heures d'enquête, les astreintes diverses et non avec un document qui somme toute se retourne contre eux.