Qui sont ils ces frondeurs au discours d'hommes libres, alors que leur statut leur enjoint de se taire ?
Des poussières d'étoile, des maillons anonymes. Ils sont ceux qui tout au long de leur carrière veillent pendant que vous dormez, ceux qui risquent leur vie pour secourir des alpinistes, ceux qui vous réconfortent et se battent pour vous lorsque vous êtes une victime, ceux qui croient encore en des valeurs fondamentales que leur société banni, ceux à qui l'on s'adresse lorsque l'on ne sait plus à qui s'adresser, ils sont eux....
Suis je désabusée, découragée, aigrie ? non, je ne suis rien de tout cela, parce que je représente un uniforme que je protégerai jusqu'à mon dernier souffle. Je suis lucide au contraire et je vois l'objet de ce qui fut leur passion être galvaudé au gré des ministères, tantôt pris en exemple tantôt montré du doigt et de tout temps balloté au vent des objectifs. Culture du résultat, culture de la qualité, baisse des accidents par des opérations répressives, prévention routière, délinquance de proximité, délinquance à grande échelle, éfficience, économie de moyens mais jamais économie d'effort, tradition multiséculaire, uniforme, déontologie, courage, doutes. Je suis la Gendarmerie. Celle là même que l'on voudrait aujourd'hui vendre en lots, déraciner de son terrain de prédilection : la proximité.... pour mieux promouvoir la culture du résultat.
Et ceux qui me servent, dit-on, leur vox populi ne traduit pas la vox déi... C'est vrai, ceux qui me servent tiennent un autre langage, simple, humble et modeste, celui de la rue, des champs et des campagnes auxquels ils appartiennent. Ils ne demandent pas l'impossible, ils ne briseront jamais des vitrines , ne s'attaqueront jamais à une préfecture, n'investiront pas davantage un édifice public. Mais, pour cotoyer chaque jour la misère humaine, il connaissent la valeur d'un engagement. Ils sont capables de se battre tout en sachant d'emblée qu'ils perdront leur combat. Ne sous estimez pas leur détermination ni leur courage, ils ont trop l'habitude d'en montrer dans leur vie de tous les jours, ne pensez surtout pas qu'ils reculeront.
Au travers de leurs attentes, c'est de ma survie dont ils se soucient. Ils sont fiers de cet uniforme, toujours en accord avec leur vocation, mais plus en phase avec la contrepartie qu'on leur offre en échange, cet os sans viande à ronger et dont on pense qu'ils s'en contenteront.
Partir et quitter leur uniforme parce qu'ils ne sont plus en accord avec la doctrine ?. Ce serait chose bien trop facile et confortable pour ceux qui me regardent avec complaisance prendre l'eau de toutes parts, satisfaits pourtant de mon naufrage annoncé tant qu'aucune voix ne s'élève pour en troubler l'effondrement.
Travailler moins, en faire moins ? Est ce ce qu'ils veulent? Non, car jamais nous ils n'auraient endossé cet uniforme. Ils souhaitent que leur "maison", moi même, ne cesse sa glissade vers l'incohérence, ils souhaitent être reconnus à hauteur de ce qu'ils apportent, être rémunérés à hauteur de ce qu'ils sacrifient, être considérés à hauteur de ce que leur doit la République, ne plus être des faire valoir muets et serviles. Ils sont gendarmes, en sont fiers et en cela , ne vous attendez pas à les faire reculer. Ils traversé avec moi les siècles, les guerres et les épidémies, les luttes pour le pouvoir, les révolutions. Et ils sont toujours là, debout, impassibles et sûrs : Moi, la Gendarmerie Nationale, et eux, sans qui je ne serai plus qu'un murmure depuis longtemps déjà.
Mais je l'avoue, ils desespèrent aujourd'hui qu'un oeil bienveillant se pose sur leur condition de forçats de la République, que les chiffres officiels ne font travailler qu'un peu plus de 8 heures par jour. Ils ne veulent rien d'autre que de pouvoir regarder droit dans les yeux le métier qu'ils exercent et de constater, rassurés que je suis prête à traverser encore quelques siècles.