Source : Var Matin
Éloignés du département par le ministère qui voulait les mettre à l’abri des voyous, ils sont désormais obligés de revenir dans le Var. Inacceptable pour eux car la menace existe encore.
Pendant des années, ils se sont battus contre les voyous. Ils se battent désormais contre la police. Depuis près de cinq ans maintenant, un couple de policiers multiplie les procédures pour que l'administration ne les mette pas en danger. Le brigadier-chef et son épouse gardien de la paix viennent de gagner une nouvelle bataille devant la cour administrative d'appel de Marseille. Dans sa décision rendue il y a quelques jours, elle ordonne au ministère de « procéder au réexamen » de leur dossier. Un dossier qui les condamnait à revenir travailler dans le Var.
En poste à La Seyne durant les années 2000, ils étaient devenus la cible des caïds locaux (et en particulier d'Abdallah Boumezaar, l'auteur du double meurtre de gendarmes à Collobrières, avant le drame).
Voiture suivie, tags malveillants dans la cité, menaces, agressions… La tension était devenue si forte que fin 2007, le ministère de l'Intérieur avait en urgence bouclé une procédure d'éloignement.
Aller simple pour l'outre-mer afin de mettre à l'abri les policiers et leur famille.
« En terme de carrière, ça a tout changé »
Depuis, les voyous ne les embêtent plus. « C'est vrai qu'on n'a plus eu de problème, en revanche, en terme de carrière, ça a tout changé », déplore le mari. « L'avancement a été stoppé net et les rapports avec les syndicats locaux sont compliqués ».
Problème en effet, sous les cocotiers, on saisit mal le parachutage du couple dans ces conditions particulières. Par ailleurs, la réglementation précisant les conditions d'affectation des policiers outre-mer est stricte, le séjour ne peut durer plus de trois ans et le retour en métropole doit se faire dans le département d'origine. Pas question pour la place Beauvau de faire une entorse au règlement sans courir le risque de voir les demandes de dérogations se multiplier.
Résultat, en 2012, le couple reçoit l'ordre de rentrer au bercail. Impensable pour les deux policiers qui considèrent que la menace est toujours présente.
L'épouse, traumatisée par les épisodes de harcèlement est toujours arrêtée.
« Circonstances graves ou exceptionnelles »
Ils saisissent alors le tribunal administratif de Toulon et obtiennent gain de cause. Un répit de courte durée puisque le ministère a fait appel de la décision. Depuis la bataille judiciaire entre les policiers et l'administration fait rage. Devant le tribunal administratif, la cour d'appel ou même le conseil d'État, ils se disputent sur les méandres des procédures d'affectation et en particulier sur le caractère de « circonstances graves ou exceptionnelles » qui permettent d'assouplir les durées de séjour outre-mer.
La dernière bataille en date vient d'être gagnée par le couple sans pour autant mettre un point final au feuilleton.« Moi de toute façon, j'ai décidé de faire valoir mes droits à la retraite », confie par téléphone le brigadier-chef qui ne dissimule pas son amertume. « La retraite à 52 ans, c'est un peu tôt et je suis obligé de créer une autre activité. Pour mon épouse, c'est plus compliqué encore parce qu'il lui reste plus longtemps à travailler, mais nous allons sûrement nous orienter vers le même type de solution. Ce qui est sûr, c'est qu'on ne reviendra pas. »
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