Selon un document que « Le Figaro» a pu consulter, les ministères sont classés en fonction de l'avancement des 362 mesures de modernisation de l'État annoncées il y a un an. La Défense et le Développement durable sont en tête.
C'est l'indifférence dans certains ministères et l'ébullition dans beaucoup d'autres. Éric Woerth, ministre du Budget, présentera mercredi au Conseil des ministres un premier bilan de la révision générale des politiques publiques, le «big bang» de l'État. La date n'est pas anodine : ce sera un an après le premier conseil de modernisation au cours duquel Nicolas Sarkozy avait annoncé la première vague de décisions. Objectif de cette communication : jauger l'état d'avancement des 362 mesures de modernisation annoncées et démontrer qu'en dépit de la crise économique le «dépenser moins» et le «dépenser mieux» sont toujours à l'ordre du jour dans les ministères. «Nous n'avons pas le choix parce que le budget pluriannuel 2009-2011 prend en compte les 7,7 milliards d'économies générées par ces décisions», explique l'entourage de François Fillon qui feint d'ignorer que cette somme est écrasée par les dizaines de milliards d'euros que la France s'apprête à débourser pour soutenir l'économie.
Qu'importe. Matignon et l'Élysée tiennent à montrer aux Français que leur administration bouge et que, «contrairement à ce qui se passait avant, la réforme de l'État ne se résume pas à des effets d'annonces». Pour être plus percutants, le ministère du Budget, Matignon et l'Élysée ont décidé de soigner la mise en scène : un feu vert pour les réformes qui - à ce stade - se déroulent correctement, un feu orange pour celles dont le plan d'action nécessite encore des travaux, et un feu rouge pour les réorganisations dont les objectifs précis ne sont pas encore clairement définis, bref pour celles dont la «cible» n'est pas encore arrêtée. «Attention, prévient un bon connaisseur de la réforme de l'État, le but, c'est de voir si le calendrier est respecté, si les objectifs et les indicateurs sont définis, si l'équipe chargée de piloter le dossier a bien été désignée.» Un bilan est même prévu tous les trois mois.
Feux verts, rouges ou orangeD'après le document de synthèse de 5 pages que Le Figaro a pu consulter, 68 % des mesures auraient décroché un feu vert. Parmi elles, la création des bases de défense d'
Hervé Morin, les agences régionales de santé portées par Roselyne Bachelot, l'automatisation des contrôles aux frontières pilotée par Brice Hortefeux ou encore le grand chantier de l'autonomie des universités qui verra le jour début 2009 et sur laquelle veille la ministre de l'Enseignement supérieur Valérie Pécresse.
En revanche, 16 % auraient obtenu un feu orange et, encore, 16 % seraient dans le rouge. De fait, certaines réformes sont encore très loin de voir le jour. Le document de synthèse liste quelques-unes parmi la soixantaine de décisions qui patinent : la redéfinition des modalités d'intervention de l'État en faveur du spectacle vivant (Culture), la révision des missions périphériques de la police et de la gendarmerie (Intérieur), l'externalisation du parc automobile de l'État (Budget). Ou encore le recensement et la redynamisation du patrimoine détenu par les opérateurs de l'État, ces entités publiques, comme les universités ou les musées, distinctes de l'État mais financées et contrôlées par lui et dont Éric Woerth a la charge.
Pour mener à bien cette mission, son ministère a envoyé début 2008 un questionnaire aux 655 opérateurs pour l'état d'avancement de leurs travaux : 455 d'entre eux n'ont pas pris la peine de répondre. Du coup, Éric Woerth a écopé d'un feu rouge et, furieux, a fait récemment savoir à l'Assemblée que les rémunérations des dirigeants des opérateurs pourraient être réexaminées. «Comme il y a une part variable que je signe, on va regarder le sujet», a expliqué le ministre aux députés.
Qui sont au final les bons et les mauvais élèves de la réforme de l'État ? En haut du podium, le ministère de la Défense et celui du Développement durable. Les armées auraient décroché 34 feux verts et 4 feux orange. Les administrations placées sous la tutelle de Jean-Louis Borloo en seraient à 22 feux verts pour un seul feu rouge correspondant à la réforme du permis de conduire. Ce qui n'en finit pas d'étonner. Les résultats de l'Intérieur seraient plus mitigés : 14 feux verts, 10 feux orange et 3 rouges. Et les autres ministères ? Ils se font discrets, craignant d'apparaître comme les mauvais élèves de la réforme de l'État. «La réforme du Code pénal et du Code de procédure pénale ne peut pas se faire en trois mois», fait valoir la Chancellerie qui semble s'interroger sur la pertinence des «feux tricolores».
Matignon refuse en tout cas de parler de bons ou de mauvais élèves. «Nous savons qu'une fois les résultats connus, des tableaux d'honneur et des bonnets d'âne seront distribués comme en septembre, lorsque François Fillon a reçu les ministres», explique un conseiller. «Un classement des ministres a bien été fait, rectifie un conseiller ministériel. Mais il ne sera pas communiqué. En effet, l'Élysée et Matignon ne peuvent pas se permettre de faire un classement à la veille d'un remaniement.» D'autant que Nicolas Sarkozy a indiqué à plusieurs reprises, notamment en décembre 2007, lors du premier conseil de modernisation des politiques publiques, que les ministres seraient aussi évalués sur leur capacité à réformer leur administration.
Sujet: Hervé Morin pour la réforme de l'État 
Jeu 27 Nov 2008 - 19:12
